
L’épilepsie est la deuxième pathologie neurologique en France, après la maladie d’Alzheimer, avec près de 650 000 personnes touchées. Près de la moitié d’entre elles sont âgées de moins de 20 ans selon la Fondation Française pour la Recherche sur l’Epilepsie. Le point sur l’épilepsie avec le docteur Michel Vastène, neurologue.
La crise d’épilepsie, c’est quoi au juste ?
L’épilepsie est une maladie neurologique qui peut être chronique, qui se caractérise par des manifestations physiques transitoires résultant de décharges électriques rapides et excessives d’influx nerveux dans le cerveau, comme des “éclairs” parcourant les neurones. Ces décharges sont localisées dans la partie périphérique du cerveau (ou cortex). Le diagnostic d’une crise d’épilepsie est assez simple et évident.
On distingue l’épilepsie généralisée tonico-clonique auparavant appelée “grand mal” et l’épilepsie focalisée.
- L’épilepsie généralisée est le type d’épilepsie la plus connue. Le malade perd connaissance, tombe, se raidit et tremble exagérément (ce grand tremblement constitue des clonies). Il peut aussi se mordre fortement le bord latéral de la langue s’uriner dessus, baver. La crise dure généralement 10 minutes. Elle laisse la personne dans une somnolence durant environ 30 minutes ;
- Dans l’épilepsie focalisée, l’influx nerveux anormal reste situé dans une zone cérébrale appelée “foyer épileptogène”. L’épilepsie focalisée se manifeste par des symptômes très variés, sur certaines zones du corps uniquement. On parle aussi de crise d’épilepsie partielle.
- On distingue aussi l’absence. Cette crise d’épilepsie survient en particulier chez l’enfant entre 8 et 10 ans (épilepsie-absences de l’enfant). Il a le regard dans le vide, ne se souvient pas de qui s’est passé (il est déconnecté). La crise dure environ 30 secondes. Ces absences peuvent entraver la scolarité.
- Il existe bien d’autres formes de crises d’épilepsie comme des crises avec des éléments moteurs (une seule main se met à bouger, picotements d’une main) ce sont des crises d’épilepsie partielles ou focales pouvant survenir aussi bien le jour que la nuit.
- Les crises épileptiques sensorielles sont des hallucinations visuelles, auditives, gustatives ou tactiles. Pour les hallucinations auditives par exemple, il s’agit toujours du même type d’hallucination (caractère stéréotypé) qui revient d’une crise à l’autre (son de cloche, chien qui aboie). D’une durée de 1 à 2 minutes, elle peut précéder une crise généralisée. “Quand on dit épilepsie, on parle de “grand mal”, cela fait penser au diable”, précise le docteur Michel Vastène, neurologue à la Clinique du Parc à Castelnau-le-Lez. “Dans l’esprit des gens, l’épilepsie est synonyme de personne débile. L’épilepsie n’est pourtant pas une tare ! Elle peut venir chez des gens intelligents, des ingénieurs, des médecins, y compris des hommes politiques”.
Comment se déroule une crise d’épilepsie ?
Lors d’une crise d’épilepsie l’activité électrique du système nerveux augmente soudainement et de manière désordonnée. Ce niveau d’activité au-delà duquel une crise se déclenche est appelé “seuil épileptogène”. Face à cette décharge électrique intense, les patients peuvent vivre une multitude de symptômes permettant de poser le diagnostic.
Dans les crises partielles les symptômes les plus courants sont :
- Des contractions musculaires incontrôlables des membres supérieurs et/ou inférieurs appelés “myocloniques” ou “convulsions” ;
- Des hallucinations visuelles, auditives, gustatives ou olfactives ;
- Une sensation de fourmillement dans un membre ou des picotements ;
- Des troubles du langage ;
- Des troubles du rythme cardiaque ou respiratoire, et une hypersalivation ;
Les crises partielles peuvent être accompagnées d’une perte de connaissance (appelées dans ce cas crise partielles complexes). Pendant une crise généralisée, on retrouve chez les patients des troubles moteurs dans l’ensemble du corps voire des pertes de connaissances.
Voici les signes moteurs de la crise d’épilepsie :
- Myocloniques : ce sont des contractions musculaires brèves et intenses des membres supérieurs ou inférieurs, pouvant entraîner la chute des patients ;
- Cloniques : ils se manifestent par des secousses fortes du corps ;
- Toniques : ce sont des contractures musculaires qui débutent par le cou et le visage, avant d’atteindre les muscles respiratoires et les membres ;
- Atoniques : on retrouve une diminution importante de la tonicité musculaire, pouvant concerner les muscles du cou ou tous les muscles du corps.
- Les troubles de la conscience peuvent se manifester par :
- Des absences : durant les absences, le patient pert totalement le fil de son environnement. Elles peuvent durer 10 secondes mais aussi se répéter ;
- Des pertes totales de connaissances avec généralement des troubles de la mémoire, le patient ne se souvient alors pas de la crise.
Quelles sont les causes de la crise d’épilepsie ?
Les crises d’épilepsie généralisée peuvent être idiopathiques, c’est-à-dire qu’on ne trouve aucune cause malgré les divers examens pratiqués (IRM, Scanner…), ou symptomatiques, c’est-à-dire provoquées par une maladie (kyste, inflammation…).
Les crises d’épilepsie peuvent également être causées par un dysfonctionnement métabolique sanguin (manque de sel, hypo ou hyperglycémie, insuffisance rénale), un traumatisme crânien, une intolérance médicamenteuse, un toxique (drogue…).
Pour les crises partielles ou focales, on trouve souvent à l’origine une tumeur cérébrale (bénigne ou maligne), un antécédent de traumatisme crânien ou d’AVC, une infection ou une inflammation cérébrale (encéphalite infectieuse ou inflammatoire), mais on peut aussi ne pas retrouver de cause.
Que se passe-t-il au niveau cérébral durant la crise ?
Une crise épileptique provient d’une activité électrique anormalement importante de plusieurs neurones de la couche de cortex du cerveau.
L’influx nerveux apporte une information électrique au niveau la synapse (zone entre les 2 neurones) à l’aide de neurotransmetteurs. Dans ce cas normal, le neurone ayant communiqué cette informationn’est plus alors actif. “Au cours d’une crise épileptique, les neurones deviennent hyperexcitables et hypersynchrones, ce qui provoque les fameux tremblements (clonies) si impressionnants, décrit le neurologue. Ces neurones hyperexcitables constituent le foyer épileptique. On différencie les crises épileptiques partielles ou focales ayant pour origine un foyer épileptique circonscrit, des crises généralisées provenant de l’ensemble des neurones du cerveau”.
Chaque personne a un seuil épileptogène ; au-delà de ce seuil, survient une crise épileptique. “Les patients épileptiques ont un seuil épileptogène inférieur à la normale” confirme le docteur Vastène. “Des médicaments peuvent abaisser le seuil épileptogène, en particulier certains psychotropes (médicaments agissant sur le cerveau) : neuroleptiques, antihistaminiques, quelques antidépresseurs…”.
(Source : Institut du cerveau)
Qui peut faire des crises d’épilepsie ?
Personne n’est à l’abri d’une première crise d’épilepsie. Elle peut arriver à tout âge y compris lorsqu’on est senior.
- Chez les nouveau-nés, les causes peuvent être une souffrance fœtale aiguë (manque d’oxygénation, AVC, infection materno-fœtale, dysfonctionnement métabolique), un syndrome malformatif génétique ou acquis (comme le syndrome d’alcoolisme fœtal, de par la mère ayant consommé beaucoup d’alcool pendant la grossesse), un syndrome de sevrage néonatal (alcool, psychotropes) ;
- Chez les enfants, on s’oriente vers les convulsions fébriles, les traumatismes, les infections cérébrales, les anomalies génétiques et les malformations cérébrales ;
- Chez les adolescents, on peut noter les traumatismes crâniens, les infections cérébrales, les prises de toxiques, les causes génétiques, les tumeurs ;
- Chez les adultes, beaucoup de causes sont possibles, même chez les séniors ; les AVC et la maladie d’Alzheimer sont plus probables en avançant en âge. Pour l’épilepsie généralisée idiopathique, il peut exister une prédisposition génétique, mais cela ne signifie pas que l’épilepsie soit une maladie héréditaire donc transmissible. La transmission de l’épilepsie est très complexe et ne se voit que dans un petit nombre de cas. De plus, la même anomalie peut avoir des conséquences différentes selon chaque personne.
Que faire en cas de crise d’épilepsie ?
Placez le malade sur le sol en PLS (Position Latérale de Sécurité). N’essayez pas de mettre vos doigts dans sa bouche pour l’aider à mieux respirer. Un épileptique a tendance à se mordre très fort la langue. Glissez plutôt entre ses dents un chiffon ou un morceau de bois. Protégez sa tête car dans son agitation il peut se blesser contre les pieds des meubles autour de lui. Restez avec lui toute la durée de la crise (on peut lui parler pour le rassurer). Si la crise dure plus de 30 minutes, appelez les secours. Il existe en effet un risque de survenue de plusieurs crises épileptiques d’affilée (état de mal épileptique), ce qui peut entraîner des vomissements dans les poumons, des troubles du rythme cardiaque, des lésions cérébrales. Une réanimation peut alors s’avérer nécessaire.
Quels sont les traitements de l’épilepsie ?
Un traitement n’est pas toujours administré lors de la première crise. “Généralement, on traite à la deuxième ou troisième”, précise le docteur Vastène.
Il existe de nombreux médicaments pour traiter l’épilepsie. Il y a des médicaments qui marchent mieux sur les épilepsies généralisées, d’autres qui sont indiquées dans les épilepsies partielles ou focales. Cela dépend de chaque patient, de l’âge, de ses antécédents médicaux, s’il s’agit d’un homme ou d’une femme, avec ou sans désir de grossesse.
Le médicament est déterminé en fonction des autres traitements (interactions médicamenteuses possibles).
Les antiépileptiques ou anti-comitiaux, sont à prendre sous forme de comprimés, tous les jours. La dose est montée progressivement ou bien administrée d’emblée selon le médicament. “On préfère toujours une monothérapie (un seul anti-épileptique) ; en effet, comme tout médicament, il existe des effets indésirables et des interactions médicamenteuses, et de plus ce traitement sera poursuivi durant de nombreuses années, suggère le spécialiste. Mais si l’épilepsie persiste il est possible d’augmenter la dose, soit de changer d’anti-épileptique ou de tenter une bi ou tri-thérapie. En dernier recours dans des cas très rares d’épilepsies graves et médicalement intraitables, principalement partielles (ou focales), il peut y avoir des indications de chirurgie, notamment si l’on observe une lésion visualisée sur l’IRM au niveau de l’hippocampe, siège de la mémoire. On peut alors agir en brûlant certaines zones” .
